Pourquoi l'Afrique ne comblera pas son retard économique
Lorsqu’un investisseur arrive dans un pays, il explore bien sûr les possibilités économiques, mais aussi et surtout les garanties légales et réglementaires qui lui permettraient de lancer et poursuivre ses activités dans la sérénité. Or, lorsqu’en Afrique on s’aperçoit que le clan du président infiltre presque tous les secteurs économiques, on se pose des questions. Un investisseur pourra-t-il avoir gain de cause lorsqu’il sera confronté au frère, à l’épouse ou à la cousine du président.
Dans ces circonstances, il serait difficile à un investisseur de s’aventurer à moins de se soumettre à la loi non écrite qui l’oblige à partager avec la famille présidentielle pour travailler en paix. Un système corrompu évidemment qui fait fuir même les investisseurs africains qui ne peuvent jamais avoir une visibilité non seulement à long terme, mais pire encore, à moyen et court termes.
Au regard du constat, l’Afrique n’a pas su saisir dès le début le train de la première vague de mondialisation en raison de son incapacité à créer un véritable climat socio-économique et politique qui aurait du, en principe, permettre un début de délocalisation des entreprises occidentales vers le continent africain, il est donc important pour les gouvernements africains de vouloir tirer une leçon de cet échec et s’armer d’une volonté réelle de sortir nos pays du mal gouvernance. Parfois, Il y a lieu sérieusement de douter du sérieux de la classe dirigeante africaine à vouloir le progrès économique de ce continent.
A l’évidence, les pays africains auraient pu pleinement tirer profit de la mondialisation dans sa phase première (mettre à la disposition des industriels du nord leur force de travail) si les conditions suivantes étaient réunies: stabilité politique assortie d’institutions fortes et transparentes, des gouvernants imaginatifs et visionnaires, un investissement intelligent et sans précédent dans la formation des jeunes africains.
Aucun investissement étranger n’est possible, aucun développement socio économique n’est réalisable si un pays ne cesse de connaitre une instabilité politique chronique. Malheureusement, ce dernier point reste le dénominateur commun des pays d’Afrique. A l’exception des investissements dans le domaine de l’extraction minière, il serait maladroit de penser que d’autres types d’investissement ou le transfert de technologie pourraient suivre si nos pays ne connaissent pas un climat politique stable ou tout au moins apaisée, une absence totale d’inutiles conflits ethniques ou régionalistes. Au demeurant, des pays tels que la Chine, le Vietnam, etc. utilisent le facteur de stabilité politique pour amener les entreprises occidentales à délocaliser dans leur pays respectifs. Pour cela, faut-il que les gouvernants mesurent les grands enjeux de ce monde et fassent preuve de patriotisme véritable en mettant avant que le progrès de leurs pays.
C’est pourquoi, au contraire de beaucoup d’autres, je souscris partiellement à l’affirmation d’Obama selon laquelle <<Africa does not need strong men, it needs strong institutions>> en d’autres termes l’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais d’institutions fortes. Il ne peut y avoir d’institutions fortes sans un leadership fort, sans des hommes et femmes visionnaires, honnêtes et capables de se sacrifier pour des causes justes et nobles. La qualité des institutions peut se mesurer a travers celle des hommes et femmes en charge de les animer. Qu’auraient été les institutions républicaines d’Afrique du Sud sans la bravoure historique et l’intelligence politique d’un Nelson Mandela ? General De Gaule, Franklin D. Roosevelt, Winston Churchill, Gandhi pour ne citer que ceux-ci, font aussi partie de ces hommes courageux, intègres et patriotes qui ont eu à façonner positivement l’histoire institutionnelle de leurs pays respectifs.
En Afrique, nous avons connu des jeunes hommes et femmes menés par certains leaders politiques, syndicaux, etc. qui se sont érigés sans compromission contre l’absence de démocratie, la pratique d’une corruption endémique. Imaginez un seul instant, l’Afrique regorger depuis longtemps de leaders politiques et d’opinions d’une intégrité morale remarquable et au service exclusif de l’intérêt general ? A défaut, nous avons une classe politique, en majorité kleptocrates, dont l’expérience professionnelle repose sur le pillage systématique des ressources de leur pays. Pauvre Afrique!